samedi 21 août 2010

Watain: messe pour un corps.

Watain, le mythique groupe de Black suédois, sait faire parler de lui. Dans un souci tout particulier porté à leur univers visuel, leur dernier projet a fait couler pas mal d'encre et de sang...

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C'était à l'occasion de son concert londonien que le groupe a souhaité faire éditer un nombre limité d'affiches sérigraphiées avec du sang humain. Il s'agissait de célébrer la sortie de Lawless Darkness qui peut être un événement pour certains, mais l'utilisation artistique du sang n'est finalement que très anecdotique.

Le Black metal doit être le courant musical le plus théâtral et le sang n'en est qu'un élément esthétique grandiloquent. Les sécrétions corporelles, et celle-ci en particulier, incarnent l'homme, ses failles autant que sa cruauté. Il est également un symbole historique de la genèse du mouvement né dans les cendres et l'hémoglobine. Il est surtout cette fascination morbide, ce vin divin, objet de pouvoir. Si le Black metal a largement puisé son imagerie dans la mythologie nordique, on découvrira que le sang y joue un rôle primordial. Mais celui-ci, dans une acceptation primale, est un élément transgressif (récupéré sans doute au groupe Kiss), permettant de faire du spectacle un rituel.

metastasis

Si réaliser une affiche avec du sang (mélangé à de l'encre) est une tentative artistique (notons tout de même que le point déceptif réside sans doute dans le fait qu'il ne s'agit pas du sang des membres du goupe), il est bon de rappeler que celui-ci a depuis longtemps une place de choix dans l'art contemporain : d'Hermann Nitsch à Marina Abramovic, de Gina Pane à Marc Quinn mais surtout Michel Journiac (qui en a fait un objet messianique). Récemment, c'est Eric Pougeau qui utilisa le sien comme matériau principal d'une série de "dessins buccaux". Dissolution du langage dans des flaques de souffrance. Une oeuvre dramatiquement belle et insidieusement poétique.

eric pougeau

La violence n'est pas forcement là ou l'on croit la percevoir. L'inventivité relative de Watain est honorable (on préférera tout de même leur musique) mais laissons aux artistes, ces chirurgiens du monde, le soin de faire vivre le sang au-delà du corps.

mardi 17 août 2010

The next great Work of Art.

Petite révolution dans le monde de l'art... Et comme il y a un demi siècle, cela se passe aux Etats-Unis...

Un jeu de télé réalité, Work of Art: the next great artist, vient d'être diffusé ( du 9/06 au 11/08) sur une chaîne câblée dont le but était de dénicher (après le chanteur, le mannequin, le cuisinier et le designer) le nouvel artiste contemporain à suivre...
14 participants, âgés de 22 à 61 ans, se sont lancés dans ce "Fort Boyard" de l'art où chaque semaine, ils devaient relever des défis. Les premières épreuves relativement classiques, comme réaliser un portrait, ont laissé place à d'autres relevant de questionnements récurrents de la modernité : qu'est qu'une oeuvre choquante (qui, si elle ne l'est pas, n'est pas une oeuvre dirait Duchamp), réfléchir sur le devenir des productions de masse, engager un dialogue avec l'environnement... Sous l'oeil d'un juge invité (Andres Serrano, présent le jour de l'épreuve de l'oeuvre dite subversive, vous vous en doutez, Richard Phillips, Will Cotton, Ryan Mc Guinness, David Lachapelle), chaque semaine a vu le départ d'un apprenti artiste. Apprenti, ils ne l'étaient pas tous. Certains ont déjà une galerie, et bizarrement ce sont les plus expérimentés qui partent. Les jeunes quant à eux voient là un tremplin extraordinaire.
Avec à la production Sarah Jessica Parker et comme juges et présentateurs, une ex mannequin-actrice China Chow et un galeriste Bill Powers (Half Gallery), l'émission trouve son serieux dans les propos éclairés du "Mick Jagger des ventes" Simon de Pury.

work of art

Si l'émission semble avoir été bien reçue dans le monde de l'art contemporain (qui se complait dans l'entertainment), elle pose de manière évidente plusieurs problèmes liés à la perception de l'art lui-même d'une part, mais s'enlise dans le cliché fanstasmagorique de la quête suprême du jeune génie, trublion révélé, porteur de tous les espoirs.

C'est finalement Abdi Farah, 22 ans de Baltimore qui endossera (en plus d'un chèque de 100 000 $) ce rôle... Un mythe médiatique sans idéologie ? A suivre donc !

En France, c'est l'exposition Dynasty qui a tenté de trouver des nouvelles révélations. Pas de démesure, pas de grandiloquence mais un système qui semble tout autant monté. Quant à la présence de l'art à la TV française, qui déjà se fait vraiment timide... en faire un jeu parait complètement impossible.