Rapidité, concision, message incisif et DIY sont les ingrédients d'un bon morceau de hardcore mais peuvent être aussi ceux d'un artiste.
Pour sa première exposition personnelle dans une
galerie française, Banks Violette frappe très fort et avec peu de moyens. Celui qui est surtout connu pour ses grandes installations imposantes, composées de panneaux noirs réfléchissants, d'éléments de métal raides et froids, de magistrales sculptures de néons, développe également depuis ses débuts, et toujours sous un fond musical, une pratique du dessin. Cette exposition en serait alors l'apogée.
9 dessins comme les 9 morceaux composant l'album dont il reprend le titre, Nine patriotic Hymns for Children, du groupe de metalcore americain Born Against, s'extirpent des murs comme pour happer votre insouciance.
Budweiser Triptych, 2011, graphite sur papier monté sur aluminium, 182,9x91,4x5,7 cm chaque.
Puisant souvent ses référents dans la culture populaire américaine, il injecte à ces oeuvres toute la force et l'intelligence nécessaires pour en faire de véritables hymnes. On n'est pas surpris de retrouver certains éléments récurrents de son travail comme le Christ, le drapeau américain, Pégase, les fleurs, les logos de bières qui, sortis de leur contexte, peuvent révéler toute leur puissance esthétique. On reconnait ici la pochette de Poison Idea dans l'oeuvre éponyme, là les soeurs jumelles chanteuses du groupe néo-nazi Prussian Blue, le 88 très ambigu, renvoyant ici au numéro d'écurie du pilote de stock car Dale Earnhardt Jr, là encore un carré noir crayonné à la fois pochette de Minor Threat et allusion à Malevitch, ou enfin le logo de Mobil dévoilant un Pégase toutes ailes déployées.
De l'usage pertinent du référent...
Mais c'est la technique employée pour présenter ces dessins qui apparaît comme un aboutissement impressionnant. Auparavant sous verre, ses délicates oeuvres sur papier Arches, aux bords frangés, ou sur calques, se voient directement montées sur des plaques d'aluminium très épaisses dont les bords apparents formeraient le cadre. La structure du support est volumineuse et lourde et donne au dessin une dimension sculpturale. Enfin, c'est la présence de scotch noir ou gris, le gaffeur utilisé couramment dans le monde du spectacle, et vu dans certaines pièces antérieures de l'artistes, qui vient sublimer l'ensemble. Posé à même le papier, il appuie ou détermine le motif dans une violence graphique percutante.
Détail de Poison Idea, 2011, graphite sur papier, collage sur cadre aluminium, 76,2x76,2 cm
Le choix volontaire et affirmé du mode de monstration de ces oeuvres est si pertinent qu'il fait de cette exposition une des meilleures de cette année, et de Banks Violette un génie punk aussi effronté qu'intelligent. Splendide...